On ne peut parler d'informatique à Grenoble sans évoquer l'aventure industrielle grenobloise, la coopération université-industrie, le role de Jean Kuntzmann et le développement des Mathématiques appliquées.
Sans remonter jusqu'à la métallurgie développée par les Pères Chartreux, la première grand industrie grenobloise fut la ganterie. Pas n'importe quels gants : exclusivement des gants de chevreau. L'invention de la « main de fer » par Louis Jouvin en 1832, va permettre de standardiser et multiplier la production.
Arrivent ensuite les cimenteries : Louis Vicat, vers 1830, maîtrise la chimie du ciment et lance un grande production en exploitant les calcaires de Chartreuse.
Les papeteries se sont installées au pied du massif de Belledonne. On y trouve le bois, l'eau et l'énergie motrice des moulins.
L'ingénieur centralien Aristide Bergés vient s'installer à Lancey. Il développe un nouveau « défibrillateur » (une machine à extraire les fibres du bois) mais manque de puissance pour l'actionner. Il décide d'aller prendre l'eau dans un lac plus haut. Les tuyaux vont exploser ? Mais non : il fait fabriquer des conduites "forcées" capables de résister à la pression.
Il obtient de la puissance en quantité. Nous sommes vers 1880, on sait depuis peu produire de l'électricité avec des dynamos. Bergés couple une dynamo avec une turbine et éclaire ses ateliers. En 1882, il éclaire la ville de Lancey. Il présente une démonstration de son équipement à la foire de Grenoble... Les journaux parlent de la « Houille Blanche » !
Grenoble se lance dans l'hydro-électricité : les conduites forcées sont réalisées par Bouchayer-Viallet, les turbines par Neyret-Bellier et Picard-Pictet, les équipements électriques par Merlin-Gérin. En 1925, la Foire internationale de Grenoble célèbre la Houille Blanche !
Il faut des ingénieurs pour conduire ces industries. Dès 1910, sous l'impulsion de Félix Viallet, maire de Grenoble, on construit l'Institut Polytechnique de Grenoble sur un terrain près de la gare.
Et depuis, l'industrie et l'université se font la courte-échelle !
Arrive la guerre de 1939-1945. La ville de Strasbourg est totalement évacuée car trop exposée. Son université est délocalisée à Clermont-Ferrand.
Le physicien Louis Néel (1904-2000) arrive finalement à Grenoble et va attirer autour de lui de nombreux chercheurs. Le mathématicien strasbourgeois Jean Kuntzmann (1912-1992) rejoint Grenoble à la libération des camps de prisonniers. C'est un pur mathématicien, mais dans le cadre de la coopération université-industrie, il découvre le besoin de développer des techniques mathématiques appliquées au travail de l'ingénieur.
Ce sera finalement dans le cadre de l'INPG qu'il va lancer un « laboratoire de calcul » en 1951. Celui-ci va prendre un développement fantastique et donner naissance à l'IMAG, Institut de Mathématiques Appliquées de Grenoble, éclaté aujourd'hui en plusieurs laboratoires renommés et une école d'ingénieurs ENSIMAG.
N'allons pas trop vite : nous retrouverons à plusieurs reprises le laboratoire de calcul et l'IMAG dans notre visite.
Mais au début, de quels outils de calcul dispose le laboratoire ?
– des abaques,
– des feuilles de calcul (futurs algorithmes...),
– des table de logarithmes,
– des règles à calcul,
– des calculatrices à manivelle Brunsviga, puis des calculatrices électriques Marchant... ... toutes ces sortes d'outils que nous venons de rencontrer dans notre visite.